Extrait /
Le Banquet des Empouses d’Olga Tokarczuk, l’éloge de la différence
Comme Hans Castorp dans La Montagne Magique de Thomas Mann, Mieczyslaw Wojnicz ouvre le roman Le Banquet des
Empouses en grimpant sur la colline où se situe le sanatorium pour les malades de la tuberculose. Les deux protagonistes ont le même âge et les deux récits se déroulent en 1913. Le premier se situe à Davos, et le deuxième en Silésie, à Görbersdorf qui fut le précurseur de cures contre les maladies respiratoires en climats froids. Plusieurs épisodes et les personnages se font écho. Toutefois, c’est en lisant Tokarczuk qu’on s’aperçoit de l’absence des femmes sur la Montagne Magique ou plutôt on ne prête pas attention à ce sujet. La seule présence féminine est celle d’une mystérieuse femme russe, Clawdia Chauchat, qui concentre en elle tous les clichés du féminin : une beauté blonde venue d’ailleurs, un port physique hautain et inaccessible, une belle élégance vestimentaire. Aucune parole, et les regards interrogateurs des hommes lorsqu’elle traverse, faussement indifférente, la salle à manger.
Tokarczuk emprunte à Thomas Mann ce personnage, inséparable de son chapeau, mais on la croise à la sortie d’une église
orthodoxe russe, telle une icône moderne. À la fin du roman on voit disparaître au loin son chapeau lorsqu’elle quitte Görsberdorf.
Comme une féminité d’un autre siècle.
L’absence des femmes n’est cependant pas sans conséquences dans l’univers masculin du sanatorium. Visites en cachette dans un
bordel…